La dépendance aux agences privées
Les publications sur les réseaux sociaux sont intrigantes :
« Deviens Paramédic sur appel selon tes disponibilités !!! 39,40 $/h »
« Nous sommes à la recherche de professionnels passionnés et qualifiés pour rejoindre notre équipe en tant que techniciens ambulanciers paramédics en soins primaires (TAP) et effectuer des remplacements chez notre client, un service d’ambulance majeur… »
Dans ce cas, le « service d’ambulance majeur » est Urgences-santé — l’organisme parapublic qui fournit des services de soins préhospitaliers d’urgence pour Montréal et Laval.
L’entreprise qui recruter des paramédics est Équipe Médicale et sa division placement GEM Solutions dont le contrat avec Urgences-santé prévoit la mise à disposition de paramédics sur appel à compter du 1er juillet.
Encore une autre agence de placement privée sous contrat pour fournir des professionnels de la santé à la demande pour un réseau de santé qui a fait une hémorragie les personnel de première ligne à un rythme si élevé qu’il est difficile de croire qu’il n’a pas encore exsangue.
« Ce qui est notre problème depuis plusieurs années, c’est les départs. […] On n’a pas juste un problème d’attraction, on a un problème de rétention. »
— Une citation de Christian Dubé, ministre de la Santé et des Services sociaux du Québec
Pourtant, plutôt que d’aborder la question de la rétention, de l’amélioration des conditions de travail des paramédics, le système de soins préhospitaliers d’urgence continue de s’appuyer fortement sur la béquille des agences privées de placement.
« Depuis janvier 2023, nous avons accordé 564 quarts de travail de 12 h, soit l’équivalent d’environ 6700 heures. Il s’agit majoritairement de quarts de travail de nuit et de fins de semaine », a déclaré Chantal Comeau, chef de service, Communications, Urgences-santé.
« Ce soutien a pour objectif de nous permettre de répondre à la demande de la population et d’atténuer les effets de la pénurie de main-d’œuvre sur le personnel.
« En ce qui concerne les heures qui seront attribuées d’ici la fin de l’année, cela dépendra des niveaux des effectifs et des besoins. Comme tu le sais, nous sommes présents en processus d’embauche et d’intégration de nouveaux paramédics pour la saison estivale. Les efforts d’embauche se poursuivront également tout au long de l’année », a déclaré Comeau.
Au cas où vous vous poseriez la question, les paramédics des agences privées ne sont pas bon marché.
Le contrat actuel entre Urgences-santé et BTAQ (basé à La Tuque QC) prévoient un tarif de 62,06 $/h, ce qui inclut toutes les charges d’employeur (CNESST, avantages sociaux, etc.) et les frais administratifs. Entre le 6 décembre 2022 et le 5 juin 2023, la BTAQ a facturé Urgences-santé 221 412,83 $.
Il reste donc un peu plus de 194 000 $ à facturer pour combler les 6 700 heures déjà remplies par les paramédics de la BTAQ aux Urgences-santé pour un total de 415 802 $. Juste pour les six premiers mois de l’année.
L’été, c’est quand le vrai "crunch" arrive pour Urgences-santé. C’est alors que les volumes d’appels montent en flèche alors que la saison des festivals de Montréal passe à la vitesse supérieure. C’est aussi une période de l’année où les vacances épuisent les ressources humaines et où les week-ends et les horaires de nuit fonctionnent souvent avec 25 % de personnel en moins que nécessaire pour un effectif complet.
J’ai demandé à Claude Lamarche, président du Syndicat du préhospitalier-CSN, de répondre au fait qu’Urgences-santé utilisent des agences de placement pour combler les quarts de travail — surtout le soir/la nuit et les fins de semaine ?
« Notre crainte est à l’effet que les jeunes quittent Urgences-santé (U/S) pour aller travaille pour l’agence…. Sans se soucier de leur fonds de pension et des conséquences plus tard », a déclaré Lamache.
Interrogé sur la promesse de Ministre Dubé d’éliminer le recours aux agences de placement privées dans le système de santé, Lamarche s’est indigné.
« Il a fait tout pour supprimer les agences dans le réseau de la santé et expliquez (pourquoi) il utilise une agence pour une entreprise gouvernementale…. Pas cohérent ! Nous avons été les derniers à avoir le taux double pour les quarts en TS (temps supplémentaires)…. Il ne met pas d’incitations pour attirer les gens vers U/S… ni pour les garder… Non il aime mieux faire affaire avec le privé qui ne sont pas ses employés ! C’est très inquietant ! »
Alors que le côté monétaire fait certainement partie de l’attrait pour travailler comme paramédic contractuel, la possibilité de découvrir différentes régions du Québec est un grand attrait. Un paramédic sous contrat m’a parlé de « tombé en amour avec la Côte-Nord. Je vais à Port-Cartier et Sept-Îles, des fois Havre-Saint-Pierre. Ce sont des places magnifiques. »
J’ai parlé avec un paramédic sous contrat qui m’a expliqué qu’il travaillait avec une agence de placement à côté pour un revenu supplémentaire. « J’adore voyager partout au Québec pour voir de nouveaux endroits et de nouveaux collègues. J’ai déjà travaillé trois fois chez Urgences-santé. J’aime ça. Je vais m’en tenir à ce modèle pour l’instant car j’ai besoin d’argent pour financer de nouveaux projets et c’est une mine d’or. »
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