Slug: "Urgences-sauté"
English version follows the French.
(29-12-2024)
Introduction (Décembre 2024) :
J’écris sur le système de soins préhospitaliers d’urgence depuis aussi longtemps que j’en fais partie. Et, à ce stade, cela fait un bon bout de temps. Alors que 2024 tire à sa fin et que nous sommes à l’aube de 2025, j’ai pensé qu’il serait intéressant de revisiter certaines de mes notes de journaliste datant de l’an 2000.
À l’époque, je travaillais comme journaliste à temps partiel pour The Suburban. L’éditeur en chef était un journaliste chevronné du nom de Jim Duff. Duff, en tant qu’éditeur, était exigeant, dévoué et résolument « Old School ». Il m’encourageait à écrire une prose percutante, à suivre toutes les pistes possibles et à rechercher minutieusement tout sujet sur lequel je travaillais.
J’ai pris une quantité phénoménale de notes. J’ai compilé tout cela dans des ébauches d’articles au format numérique. Ces fichiers étaient sauvegardés sur un disque indépendant, qui prenait la poussière à la fin d’une étagère coincé entre mes derniers disques vinyles.
J’ai retrouvé ce disque à côté de Sentimental Hygiene de Warren Zevon, qui contenait la chanson Reconsider Me, une pièce pas vraiment un succès dans les charts mais brillante en spectacle.
« Si tu es seul(e)
Et que tu as besoin de quelqu’un
Appelle-moi
Et je viendrai en courant
Reconsider me
Reconsider me
Si c’est encore le passé
Qui te fait douter
Chéri(e), c’était avant
Et ceci, c’est maintenant »
En octobre 2000, je travaillais sur un article dont le titre de travail était « Urgences sauté ». Un titre de travail, ou slug, est un court titre donné à un article pendant qu’il est en cours d’édition et de révision. Il sert d’identifiant unique tout au long du processus éditorial.
Peut-être plus que tout, ces notes offrent une fenêtre sur les coulisses de l’histoire des soins préhospitaliers d’urgence au Québec et des conflits de travail qui l’ont accompagné presque sans relâche depuis ses débuts.
Slug: Urgences-sauté (Octobre 2000)
« Qu’est-ce que je suis censé dire à un gars qui fait de la RCR sur son frère depuis vingt minutes pendant qu’on arrive de l’autre bout du monde ? »
Urgences-santé est de nouveau embourbé dans un conflit de longue date avec ses techniciens ambulanciers. Ce conflit, le septième en dix ans, menace d’éclater depuis septembre.
Au cœur du problème : le nombre insuffisant de techniciens ambulanciers pour assurer le service des ambulances de la flotte de la corporation.
Les ambulanciers affirment qu’il n’y a tout simplement pas assez de véhicules sur la route pour offrir des services médicaux d’urgence équitables dans la région métropolitaine de Montréal-Laval.
Urgences-santé réfute les allégations des techniciens ambulanciers depuis le début du conflit.
Ce journaliste a appris qu’il est courant que la flotte d’Urgences-santé soit réduite à un ou deux véhicules disponibles à un moment donné pour toute la région.
Bien que la corporation ait mis en place un système de répartition assistée par ordinateur d’une valeur de plusieurs millions de dollars il y a seulement un an, un initié du milieu ambulancier explique :
« Le système suit les ambulances. Il ne peut pas les cloner. Sept millions de dollars, c’est beaucoup d’argent pour suivre les déplacements d’une seule ambulance. »
« Et on roule 15… 20 minutes pour un arrêt cardiaque où il n’y a aucun premier répondant. Qu’est-ce que vous pensez qu’il va arriver au patient ? Ils (les répartiteurs) devraient juste envoyer Urgel Bourgie. »
Rétrospective sur ce conflit :
15 septembre
Deux autobus remplis (environ 100) de techniciens ambulanciers envahissent le siège social de la corporation sur la rue Bélanger. En forçant des portes verrouillées, les ambulanciers couvrent les murs, les portes, les fenêtres et les écrans d’ordinateur de l’immeuble — qui abrite également le centre de communications d’urgence des services.
10 septembre
Un câble de fibre optique reliant le siège social d’Urgences-santé à son centre ambulancier de l’est de Montréal est sectionné.
9 septembre
Deux véhicules de supervision sont volés. L’un d’eux est retrouvé submergé dans la rivière des Prairies. Son équipement de communication sophistiqué à bord et le matériel médical d’urgence dans le coffre sont complètement détruits.
3 septembre
Une ambulance d’Urgences-santé est volée et abandonnée sur la pelouse devant la maison du directeur d’Urgences-santé, à Varennes, avec les gyrophares et la sirène en marche.
2 septembre
Les techniciens ambulanciers d’Urgences-santé échangent des ambulances entre eux et avec des collègues hors de l’île. Ces échanges perturbent la gestion des appels par les répartiteurs. Certaines ambulances sont abandonnées sur des coins de rue avec les gyrophares et la sirène en marche, dans le but d’attirer davantage l’attention.
Avec la montée des tensions et des tactiques de plus en plus radicalisées, ce journaliste a appris que les leaders syndicaux s’inquiètent de plus en plus de perdre le soutien du public dans ce conflit de travail — et qu’un décret gouvernemental pourrait être imminent.
Épilogue (Décembre 2024) :
Près de 25 ans plus tard, je connais des paramédics vétérans qui ont une collection complète de t-shirts syndicaux, chacun représentant une campagne de plus dans une bataille sans fin pour améliorer les conditions de travail, les régimes de retraite, les salaires, etc.
La liste des ministres de la Santé depuis 2000 est impressionnante : Pauline Marois (PQ) ; Rémy Trudel (PQ) ; François Legault (PQ) ; Philippe Couillard (PLQ) ; Yves Bolduc (PLQ) ; Réjean Hébert (PQ) ; Gaétan Barrette (PLQ) ; Danielle McCann (CAQ) ; et Christian Dubé (CAQ).
De nombreux rapports ont été commandés. Des centaines de recommandations ont été faites. Des plans complets pour transformer le système des soins préhospitaliers d’urgence du Québec – à commencer par Urgences-santé – ont été élaborés.
Et nous voilà, presque 25 ans après que j’ai commencé à rédiger cet article, et la structure de base du système nécessite encore des ajustements.
Devrait-il y avoir une marge de profit associée à l’art et à la science de soigner ? Quand les paramédics seront-ils reconnus comme des professionnels de la santé ? Quand les besoins des patients et de ceux qui s’occupent d’eux deviendront-ils enfin le centre de gravité du système ?
Quo vadis, ministre Dubé ? Où allez-vous avec ce système défaillant ?
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Slug: Urgences-sauté
Introduction (December 2024):
I’ve been writing about the emergency prehospital care system as long as I have been a part of said system. And, at this point, that’s a long time. As 2024 draws to a close and we are on the verge of 2025, I thought it would be informative to revisit some of my writer’s notes from the year 2000.
I was working as a part-time journalist at The Suburban. The editor was a veteran journalist named Jim Duff. Duff as an editor was demanding, dedicated, and decidedly Old School. He encouraged me to write high-impact prose, to chase down every lead, and to research the hell out of whatever I was working on at the time.
I took an absolute ton of notes. I compiled everything into working drafts of stories in digital files. Those files were stored on a stand-alone drive which had been gathering dust squeezed in at the end of a shelf with my remaining LPs. I found the drive next to Warren Zevon’s Sentimental Hygiene which featured the not-a-chart-success-but-brilliant-live-show-piece ‘Reconsider Me.’ As imperfect a fit as possible.
“If you're all alone
And you need someone
Call me up
And I'll come running
Reconsider me
Reconsider me
If it's still the past
That makes you doubt
Darlin', that was then
And this is now”
In October 2000, I was working on a story with the working slug of ‘Urgences sauté’. A slug is a short title given to an article while it’s being edited and reviewed. It serves as a unique identifier throughout the editorial process.
Perhaps, more than anything else, these notes provide a window into the back alley of the history of the emergency prehospital care in Québec and the labour strife that has been a near constant companion since its very beginnings.
Slug: Urgences-sauté (October 2000)
"What am I supposed to tell a guy who’s been doing CPR on his brother for twenty minutes while we’re coming from the other side of the world?"
Urgences Santé is embroiled in yet another long-simmering dispute with its ambulance technicians. This conflict, the seventh labour crisis in the last ten years, has been threatening to boil over since September.
At issue is the number of ambulance technicians available to staff the corporation’s fleet of ambulances.
The ambulance techs claim there are simply not enough rigs on the road to adequately deliver emergency medical services equitably in the Montréal-Laval metropolitan region.
Urgences Santé has refuted the ambulance technicians’ claims since the beginning of the dispute.
This journalist has learned it is common for the Urgences Santé fleet of ambulances to be reduced to just one or two available trucks at any given moment for the entire region.
Although the corporation implemented a multi-million dollar computer assisted dispatch system only one year ago, an ambulance insider says,
“The system tracks the ambulances. It can’t clone them. Seven million dollars is a lot of money to track the movements of only one ambulance.”
“And we’re rolling 15… 20 minutes to a cardiac arrest where they are no (first) responders. What do you think is going to happen to the patient? They (dispatchers) should just send Urgel Bourgie.”
A review of this conflict:
September 15: Two busloads (approximately 100) of ambulance technicians swarmed the corporation’s headquarters on Belanger Street. Breaking through locked doors, the ambulance techs plastered walls, doors, windows, and computer monitors throughout the building—which also houses the services’ emergency communications center.
September 10: A fibre-optic cable connecting Urgences Santé’s headquarters to its east-end ambulance center was slashed.
September 9: Two supervisor vehicles are stolen. One of them is found submerged in the Riviere des Prairies. Its sophisticated onboard communication equipment and the emergency medical gear in the trunk are a total loss.
September 3: An Urgences Santé ambulance is stolen and is later abandoned, emergency lights flashing and siren blaring, on the front lawn of Urgences Santé's director's home in Varennes.
September 2: Urgences Santé ambulance technicians swap ambulances with one another and with colleagues from off the island. The exchanges affect the manner in which calls are dispatched to the ambulance crews. Some ambulances are abandoned on street corners with the emergency lights flashing and sirens blaring in order to attract further attention.
With the temperature rising and tactics becoming more radicalized, this journalist has learned that union leaders are increasingly concerned they are losing the battle for the support of the public in this conflict – and that a government decree may be in the offing.
Epilogue (December 2024):
Almost 25 years later I know some veteran paramedics who have a complete collection of union t-shirts, each of which represents another campaign in a never-ending battle to improve working conditions, pensions, remuneration, etc.
The roster of Health Ministers from 2000 until now is impressive: Pauline Marois (PQ); Rémy Trudel (PQ); François Legault (PQ); Philippe Couillard (PLQ); Yves Bolduc (PLQ); Réjean Hébert (PQ); Gaétan Barrette (PLQ); Danielle McCann (CAQ); and Christian Dubé (CAQ).
Multiple reports were commissioned. Hundreds of recommendations were made. Entire prescriptions for the transformation of Québec’s emergency prehospital care system – beginning with Urgences-santé – were crafted.
And here we are, almost 25 years after I began crafting that article and the basic structure of the system still needs to be addressed.
Should there be a profit margin attached to the art and science of caring? When will paramedics be recognized as healthcare professionals? When will the needs of patients and the people who care for them finally become the central focus of the system?
Quo vadis, Minister Dubé? Where are you going with this flawed system of ours?
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